Pas de paix sans libération

16.11.2025

Résolution adoptée lors de l'assemblée des délégué·es de la JS Suisse du 15 novembre 2025 à Zoug


Donald Trump, le président fasciste des USA, a présenté son plan pour Gaza le 29 septembre. La première phase de ce plan a été acceptée par le Hamas et Israël le 3 octobre ; elle prévoyait l’échange des 20 otages israéliens encore vivants contre un tiers des 6000 otages palestiniens de Gaza encore dans les centres de détention et de torture israéliens[1].

Il en est ressorti un cessez-le-feu qui devrait (malgré ses nombreuses violations par Israël) réduire l’ampleur du génocide et offrir un répit à la population palestinienne. Le "plan Trump" n’offre cependant pas la perspective d’une paix juste mais la poursuite du colonialisme israélien et de l’impérialisme étasunien, et il place les Palestinien·nes dans une situation encore plus injuste qu’il y a deux ans. Le droit du peuple palestinien à l’autodétermination, à l’égalité de traitement et à la liberté n’est pas négociable.

Ce plan est condamnable ne serait-ce qu’en voyant les conditions dans lesquelles il a été développé :

Comme toujours dans l’histoire du peuple palestinien, ces "plans de paix" sont négociés sans consultation avec les personnes concernées. Une fois de plus, les USA, le Royaume-Uni, Israël et d’autres nations alliées imposent à la population palestinienne les conditions la soi-disant paix qu’ils ont conçue pour elle.

Ces États sont cependant les mêmes qui ont créé les conditions du génocide du peuple palestinien. Ils ont toléré et rendu possible la Nakba ("catastrophe" en arabe), qui a commencé en 1947 par l’expulsion violente des Palestinien·nes de leur territoire et a servi de base à la colonisation de la Palestine historique. Or, les États censés garantir la mise en œuvre conforme du traité sont précisément les mêmes qui soutiennent Israël dans le génocide actuellement en cours à Gaza.

Poids plus important encore : les conditions du plan signé ont été imposées ouvertement et publiquement sous la pression de la famine et du génocide. Israël a délibérément provoqué la famine à Gaza en détruisant l’agriculture, en interdisant la pêche et en bloquant l’acheminement de l’aide humanitaire[2]. Cette pression a également été ouvertement admise, le "plan Trump" ne prévoyant l’acheminement libre de l’aide humanitaire qu’en cas d’acceptation du plan. La fin du blocus illégal de l’aide humanitaire passe ainsi du statut de droit humain à celui de monnaie d’échange.

Le non-respect des conditions imposées, parfois impossibles à remplir, ne peut donc justifier les violations du cessez-le-feu par Israël. Ces conditions impossibles incluent par exemple l’exigence de retrouver et ramener tous les otages morts sous les décombres laissés par Israël à Gaza dans les 72 heures suivant l’acceptation du plan par Israël.

Cet "accord" international ayant été conclu sous la contrainte, il est nul et non avenu au regard du droit international, en plus de violer la Charte des Nations unies en raison de l’absence de reconnaissance du droit à l’autodétermination et de la souveraineté du peuple palestinien[3].

Il apparaît de manière évidente dès le premier point du plan que celui-ci consolide les rapports de force établis par le génocide, puisqu’il impose la classification de Gaza comme zone "sans terrorisme" incapable de représenter le moindre danger pour les pays voisins. Israël, lui, ne se voit imposer aucune exigence de ce type, malgré qu’il ait bombardé sept pays différents au cours des deux dernières années[4]. Sous prétexte de lutter contre le terrorisme, Israël opprime l’ensemble de la population palestinienne et réprime toute résistance, alors que le droit international des Nations unies reconnaît aux Palestinien·nes le droit de se défendre contre l’occupation coloniale[5].

Le point neuf du plan révèle lui le véritable projet formulé pour Gaza. Il y est question d’un comité technocratique et apolitique, supervisé par un "conseil de paix" présidé par Donald Trump et Tony Blair. Ils seraient donc chargés de définir le cadre dans lequel Gaza doit être reconstruite afin que cette reconstruction soit attractive pour les investisseurs.

Cela signifierait rien de moins que la privatisation de la reconstruction afin de maximiser les profits de quelques-uns : logiquement, cette exigence amène à la construction de complexes hôteliers de luxe plutôt que de logements abordables. Ce problème se retrouve également au point dix, qui cite indirectement des villes comme Dubaï comme sources d’inspiration pour la reconstruction. Cette vision présente un risque sérieux que la population palestinienne soit évincée par la gentrification de son territoire dans une processus où le génocide actif céderait simplement la place à un nettoyage ethnique organisé de manière technocratique.

L’idée que le contrôle de Gaza soit ensuite transféré à une nouvelle organisation militaire sous direction jordanienne et égyptienne est d’un cynisme sans pareil. En effet, cela signifie que les États qui portent une responsabilité historique dans la Nakba seront à nouveau impliqués dans la décision concernant les 20 % restants du territoire historique de la Palestine.

La menace d’occupation de Gaza par ces pays sert à donner un visage arabe à l’occupation, bien que ces deux régimes soient antidémocratiques et agissent aujourd’hui dans l’intérêt des États-Unis et d’Israël. Cette manière de procéder participe donc d’une forme de contrôle impérialiste sur Gaza et exclut toute autonomie démocratique des Palestinien·nes.

Et en dépit toutes les conditions répressives posées, Israël ne semble même pas disposé à respecter l’accord. Depuis la signature du "plan Trump" à Gaza, Israël a déjà nettement violé le cessez-le-feu. À date du 29 octobre 2025, Israël avait tué plus de 200 nouvelles personnes à Gaza. En outre, Israël a arbitrairement réduit de moitié la quantité d’aide humanitaire promise et continue de détruire les infrastructures civiles[6]. Il est tout à fait concevable qu’Israël, comme au début de l’année 2025, poursuive le génocide à grande échelle après un cessez-le-feu temporaire.

La situation est similaire à celle du Liban, qui est bombardé régulièrement depuis l’accord de cessez-le-feu conclu fin 2024. Ces violations du traité sont tacitement acceptées par les garants du cessez-le-feu, la France et les États-Unis, qui sont également les alliés d’Israël. Le même cas se représente ici, où ce sont à nouveau des alliés d’Israël qui sont censés garantir le respect de la "paix".

En effet, même si Israël ne choisit pas d’ignorer le cessez-le-feu, celui-ci sert ses intérêts car il réduit la pression internationale exercée sur Israël pour mettre fin à son projet génocidaire et colonial. Gaza ne ferait alors plus l’objet d’aucune attention médiatique, de la même manière que les bombardements continus du Liban depuis le cessez-le-feu.

Ce plan est donc une réaction directe à la pression internationale croissante exercée par le mouvement global de solidarité avec la Palestine et vise à donner une façade diplomatique et prétendument pacifique à la politique coloniale d’Israël. On voit d’ailleurs de quelle manière le cessez-le-feu est déjà utilisé comme prétexte pour retarder les sanctions contre Israël[7].

C’est pourquoi nous rejetons le "plan trump", imposé par des forces impérialistes participant au génocide. Nous nous engageons à la place, dans la rue et les parlements, pour la fin du colonialisme israélien, de l’apartheid et du génocide, car il ne peut y avoir de paix sans justice. Nous demandons donc :

  • Le retrait immédiat de toutes les troupes israéliennes et colon·es de Gaza et de Cisjordanie, ainsi que la fin du blocus sur Gaza ;
  • La fin du colonialisme et des colonies de peuplement israéliennes, de l’apartheid et des occupations militaires illégales, ainsi que de l’impérialisme étasunien et des autres dans l’ensemble de la région ;
  • La circulation générale et sans conditions de l’aide humanitaire vers Gaza sans chantage à la population civile. L’aide humanitaire ne saurait être soumise à de quelconques conditions ;
  • Le droit au retour, à la réparation, à la résistance et à l’autodétermination pour la population palestinienne ;
  • La reconstruction de Gaza sans recherche d’intérêts ou de profits financée par des fonds du centre impérial qui soutient ce génocide depuis deux ans et ignore les souffrances provoquées ;
  • La fin de la collaboration militaire, économique, scientifique et politique avec Israël ;
  • Le développement d’un large mouvement de solidarité et de lutte de classe avec la population palestinienne.

[1] https://www.bbc.com/news/articles/c70155nked7o

[2] https://www.theguardian.com/world/2025/jul/31/the-mathematics-of-starvation-how-israel-caused-a-famine-in-gaza

[3] https://bds-info.ch/de/reaktion-der-palastinensischen-zivilgesellschaft-auf-den-genozidalen-trump-netanjahu-plan/

[4] https://www.aljazeera.com/news/2025/9/10/maps-israel-has-attacked-six-countries-in-the-past-72-hours

[5] https://law4palestine.org/do-palestinians-have-the-right-to-resist-and-what-are-the-limits-short-article/

[6] https://www.aljazeera.com/news/2025/10/29/why-did-israel-launch-air-strikes-on-gaza-then-resume-truce

[7] https://www.theguardian.com/world/2025/oct/21/eu-pause-trade-sanctions-israel-donald-trump-gaza-ceasefire