Stratégie : Boycott, désinvestissement, sanctions (BDS)

21.10.2024

Stratégie : Boycott, désinvestissement, sanctions (BDS)

Résolution adoptée lors de l'assemblée des délégué-e-s de la JS Suisse du 28 septembre 2024 à Giubiasco (TI)


Depuis les résolutions adoptées le 30.04.2022 et le 18.02.2024, la JS encourage « le boycott des biens produits dans les colonies israéliennes de la zone C des territoires palestiniens occupés »(1) et revendique « l'arrêt immédiat des exportations d'armes vers Israël et la fin de toutes les relations militaires et commerciales avec le gouvernement israélien ».(2) En raison notamment du génocide en cours à Gaza, nous considérons nécessaire de nous joindre à l’appel du mouvement de boycott international BDS (boycott, désinvestissement, sanctions).
Le soutien pratiquement inconditionnel des États impérialiste d’Amérique du Nord et d’Europe occidentale à Israël l’a conduit à être pratiquement au-dessus de tout droit international depuis plusieurs décennies. Ainsi, le gouvernement israélien a ignoré les mesures préventives de la décision de la CIJ(3) et le cessez-le-feu temporaire du Conseil de sécurité de l’ONU du 25.03.2024.(4) En 2004 déjà, Israël a ignoré la décision de l'ONU qui déclarait illégale la construction du mur en Cisjordanie.(5)
En outre, depuis sa création en 1948, Israël ne respecte pas le droit au retour des réfugié·es palestinien·nes.(6)
Le 19 juillet 2024, la CIJ a conclu que l'occupation du territoire palestinien (y compris Jérusalem-Est) constituait une violation manifeste des droits humains et a demandé l'évacuation totale des colonies et la fin de l'occupation (7). La CPI envisage également d'émettre des mandats d'arrêt contre trois dirigeants du Hamas, Netanyahu et Gallant. En tant que population civile et parti activiste, nous ne pouvons pas nous attendre à ce que les États impérialistes et néocoloniaux agissent de leur propre chef contre leurs propres intérêts. Il est non seulement éthiquement, mais désormais politiquement, juridiquement et économiquement reconnu que les violations des droits de l'homme existent. Mais les jugements des structures politiques suprêmes, si elles ne sont pas suivies d’action, ne restent rien d'autre que des déclarations, sans effet sur la réalité des personnes qui souffrent. C'est pourquoi il faut agir maintenant ! Qu'attendons-nous encore ? Le temps presse.
Campagne BDS
La campagne BDS a été lancée il y a presque 20 ans, le 9 juillet 2005, portée par la société civile palestinienne. Inspirée de la lutte contre l'apartheid en Afrique du Sud, elle appelle au boycott, au désinvestissement et aux sanctions contre Israël. Elle vise les produits, entreprises et institutions israéliens ainsi que les entreprises étrangères et internationales qui participent à l'oppression du peuple palestinien et soutiennent l'occupation et l'apartheid d'Israël.
Le mouvement BDS utilise les tactiques BDS pour atteindre ses objectifs. Ces objectifs sont :

  1. La fin de l'occupation de tous les territoires avant la guerre de 1967 (Gaza, Cisjordanie, Golan, Jérusalem-Est) ;
  2. La fin de l'apartheid en Israël et l'égalité des droits pour tou·tes ;
  3. La reconnaissance et l'autorisation du droit au retour des réfugié·es Palestinien·nes. (8)

De nombreuses organisations telles que des syndicats, des associations académiques et des mouvements de base se solidarisent avec cet appel dans le monde entier. Non seulement à l'extérieur, mais aussi en Israël même, des institutions et des citoyen·nes se sont joint·es à l'appel au boycott. (9) Aujourd'hui plus que jamais, compte tenu du génocide perpétré par Israël contre les Palestinien·nes, il est crucial d'exercer une pression internationale sur Israël : Cela ne se fait pas uniquement par des demandes aux gouvernements, mais surtout par l'action directe et la participation de la population civile au sens large.
Le boycott ciblé est une stratégie légitime et non violente. Le boycott est avant tout une tactique visant à exercer une pression sur la politique, l'économie et l'éducation. Pour les acteurs de ces secteurs qui profitent du système d'apartheid en Palestine, il y a beaucoup à perdre, et pas seulement du capital économique. Il s'agit d'un moyen qui, combiné à d'autres moyens de pression, peut avoir un effet tangible. BDS est un mouvement grassroots qui vise la longue durée. De plus, il permet d'atteindre les gens et de les informer sur une cause, car il s'agit d'une méthode politique simple et efficace. Parmi les campagnes de boycott les plus réussies, on peut citer : le Montgomery Bus Boycott (1955) ; le boycott de Nestlé (1977-...) ; le boycott de la NRA (2021) ; No Business with Genocide (10).
Le désinvestissement est une autre manière efficace de mettre le système colonial sous pression financière. Comme pour le boycott, il a une valeur extrêmement forte pour lancer un débat sur les stratégies financières éthiques et légitimes des institutions et des entreprises. Il mobilise également de nombreux cercles à l'intérieur et à l'extérieur de ces institutions. Par exemple, plusieurs entreprises, églises et universités ont cessé de financer certaines sociétés impliquées dans des activités illégales. D'importants désinvestissements réussis ont été réalisés : Ben&Jerry's (2021) ; les universités américaines (11) ; l'Église presbytérienne des États-Unis (2014, 2024) ; AXA (2024) ; le KLP (2021-2024) et le Norway Wealth Fund (en cours). Plusieurs villes ont déjà commencé à désinvestir au niveau local, ce qui est également soutenu par Jewish Voice for Peace (12).
Caterpillar Inc (USA) en est un exemple frappant. Les bulldozers D9 (pesant environ 74 tonnes, comme un char de Tsahal) sont modifiés pour causer des dommages importants et graves aux infrastructures palestiniennes. En Israël aussi, les démolitions de maisons de familles palestiniennes font partie intégrante de la politique d'apartheid (13). Depuis 2000, Israël a massivement élargi cette campagne : avec de tels bulldozers, Tsahal n'a cessé depuis de détruire des maisons (14, 15), de détruire complètement des routes, comme actuellement à Jénine (16), de s'attaquer de manière ciblée à des infrastructures vitales (eau, électricité, eaux usées), et de les utiliser par exemple pour les expulsions massives dans les South Hebron Hills (17). Les bulldozers sont en outre systématiquement utilisés dans le génocide de Gaza et y ont commis de nombreux crimes (18), comme la destruction de cimetières (19). C'est également un bulldozer D9 qui a assassiné la militante pacifique de l'ISM Rachel Corrie en 2003 (20). Les bulldozers sont des armes de meurtre et ne détruisent pas seulement des matériaux, mais aussi des souvenirs, des rêves, des espoirs, des histoires et des vies. Tout cela peut être reconnu comme une épuration ethnique (21, 22), ce qui fait d'un fournisseur de bulldozers blindés comme Caterpillar Inc. une cible légitime de désinvestissement.
Les institutions et événements non militaires ne sont pas non plus automatiquement apolitiques. Même si elles ne sont pas actives dans les colonies, elles participent souvent au système de répression. Ainsi, les universités développent des stratégies, des technologies et des connaissances qui sont utilisées pour permettre la colonisation, l'apartheid et le génocide actif à Gaza (23). De plus, les institutions d'enseignement discriminent et oppriment les étudiants palestiniens (24, 25, 26). Par exemple, l'université de Johannesburg a agi dès 2011 et a rompu sa coopération avec l'université Ben Gourion. De même, les mouvements étudiants décentralisés depuis la vague d'occupation à partir du mois de mai ont pour revendication centrale le boycott académique d'Israël (et se réfèrent parfois directement aux directives du PACBI telles qu'elles ont été établies par BDS). Nous reconnaissons là le caractère progressiste et de soutien de BDS pour le mouvement plus large : par un travail d'information sur l'implication des universités israéliennes dans le génocide, on montre contre quoi exactement on proteste et pour quoi on se bat ; en même temps, on exerce une pression dans les universités à un autre niveau de la société civile. Le mouvement peut dépasser ses propres frontières, intégrer de nouvelles couches sociales dans cette lutte et formuler des revendications cohérentes. Ces deux choses n'ont été rendues possibles sous cette forme que grâce au travail préparatoire de BDS depuis des décennies. Avec cette résolution, nous soutenons donc également le mouvement étudiant, car sa stratégie est également liée à BDS.
Il est temps qu'Israël se conforme au droit international et que le Nord mondial cesse d'agir en appliquant deux poids deux mesures. BDS est une stratégie contre-hégémonique ; pacifiste et ciblée. Elle ne vise aucune communauté, aucune religion, aucune identité. Elle ne simplifie pas, ne généralise pas et fait la distinction entre les personnes et le système. Notre position précisera quel camp nous soutenons en tant que parti. Ce que nous pouvons faire, c'est écouter les besoins et les appels de la société civile et agir en conséquence. Vingt ans après le Rwanda, près de 110 ans après l'Arménie, et près de 80 ans après l'Holocauste, nous sommes à un tournant. 2024 sera l'année où nous aurons eu le choix de nous engager ou de nous contenter d'observer. Plus jamais, pour personne ! (27)
La JS Suisse se rallie donc à la stratégie de BDS. Pour la fin du système d'apartheid, la fin du génocide, un droit au retour et la liberté pour tou·tes les Palestinien·nes et l'égalité de traitement dans la région !

Sources :

(1)https://juso.ch/de/positionspapiere/wir-verurteilen-die-systematische-unterdruckung-der-palastinensischen-bevolkerung-durch-den-israelischen-staat/
(2)https://juso.ch/de/positionspapiere/das-humanitare-desaster-muss-enden-freiheit-und-gerechtigkeit-fur-palastinenserinnen/
(3) https://www.icj-cij.org/node/203447
(4) https://press.un.org/en/2024/sc15641.doc.htm
(5) https://zeitschrift-vereinte-nationen.de/suche/zvn/artikel/igh-gutachten-zum-maurbau
(6) https://www.unrwa.org/content/resolution-194
(7) https://www.icj-cij.org/case/186
(8) http://bds-kampagne.de/aufruf/aufruf-der-palstinensischen-zivilgesellschaft/
(9) https://boycottisrael.info
(10) https://www.nobusinesswithgenocide.org/
(11) https://www.tandfonline.com/doi/pdf/10.1080/13549839.2015.1009825?needAccess=true
(12) https://www.jewishvoiceforpeace.org/resource-type/campaigns/
(13)https://www.amnesty.org/en/documents/mde15/5141/2022/en/
(14) https://www.ochaopt.org/data/demolition
(15)https://ccrjustice.org/home/get-involved/tools-resources/fact-sheets-and-faqs/factsheet-home-demolitions-and-caterpillar
(16)https://www.middleeastmonitor.com/20240907-israel-army-destroys-25-kilometres-of-jenin-streets/
(17)https://www.breakingthesilence.org.il/inside/wp-content/uploads/2019/08/BTS_South HillHebron_Booklet_ENG-2019.pdf (18)https://www.commondreams.org/news/2020/02/24/war-crime-video-idf-bulldozer-dragging-body-palestinian-man-gaza-sparks-outrage
(19)https://edition.cnn.com/videos/world/2024/01/18/gaza-cemeteries-destroyed-diamond-l ead-dnt-vpx.cnn
(20) https://rachelcorriefoundation.org/
(21) https://press.un.org/en/2021/gapal1439.doc.htm
(22) Pappe, Ilian. The Ethnic Cleansing of Palestine, Israel: Oneworld 2006.
(23) https://visualizingpalestine.org/visual/academia-apartheid/
(24)https://www.hrw.org/report/2001/09/30/second-class/discrimination-against-palestinian-arab-children-israels-schools
(25) https://law.acri.org.il/en/2014/07/28/uni-gaza/
(26) https://www.haaretz.com/2014-07-22/ty-article/.premium/profs-words-on-stopping-terror-draws-ire/0000017f-dc6d-d856-a37f-fdedef790000
(27) https://ijan.org/2015/02/01/nafa/